Dragne si Monroy impotriva Romaniei

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elis

Dragne si Monroy impotriva Romaniei

Post by elis » 10 Apr 2005, 10:39

In data de 07.04.2005, prin hotararea pronuntata in cauza Dragne si altii impotriva Romaniei, Curtea Europeana a Drepturilor Omului a constatat ca Romania a incalcat art. 6 alin. 1 din Conventie si art. 1 din Protocoul nr. 1, pentru ca nu a asigurat punerea in executare a unei hotarari judecatoresti pronuntata in anul 1995, in materie de fond funciar.

In data de 05.04.2005, prin hotararea pronuntata in cauza Monory impotriva Romaniei si Ungariei, Curtea Europeana a Drepturilor Omului a constatat ca Romania a incalcat art. 8 din Conventie, prin faptul ca nu a luat masuri adecvate si eficiente pentru ca reclamantul sa-si poata exercita drepturile parintesti.

cumintzica

Post by cumintzica » 11 Apr 2005, 07:33

se poate gasi pe undeva si textul deciziilor, macar intr-o limba straina?
de ce dureaza asa de mult publicarea acestor decizii in M. Of? hotararea de la sf anului trecut, cea din care s-a dat la examen nu a aparut nici acum, nu?

elis

Post by elis » 11 Apr 2005, 08:35

Asta este adresa la care ma documentez eu: http://www.echr.coe.int/Eng/Press/PressReleases.htm

Blusie

Post by Blusie » 11 Apr 2005, 10:14

Sigur :!:

Toate deciziile CEDO se gasesc in arhiva HUDOC. Probabil ca stiti deja sa o utilizati. De obicei, hotararile se pot gasi in engleza si franceza. Insa hotararile mai noi, cum e cazul Dragne, se gasesc numai in limba franceza.

Blusie

Post by Blusie » 11 Apr 2005, 10:32

Iat-o :

TROISIEME SECTION







AFFAIRE DRAGNE ET AUTRES c. ROUMANIE


(Requete no 78047/01)












ARRET




STRASBOURG


7 avril 2005



Cet arret deviendra definitif dans les conditions definies a lnarticle 44 - 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.






En lnaffaire Dragne et autres c. Roumanie,

La Cour europeenne des Droits de lnHomme (troisieme section), siegeant en une chambre composee de :

MM. B.M. Zupanèiè, president,
J. Hedigan,
C. Birsan,
Mmes M. Tsatsa-Nikolovska,
A. Gyulumyan,
R. Jaeger,
M. E. Myjer, juges,
et de M. V. Berger, greffier de section,

Apres en avoir delibere en chambre du conseil le 17 mars 2005,

Rend lnarret que voici, adopte a cette date :


PROCÉDURE

1. A lnorigine de lnaffaire se trouve une requete (no 78047/01) dirigee contre la Roumanie et dont six ressortissants de cet Etat, Mmes Filofteia Dragne, Smaranda Branescu, Smaranda Matei, Maria Neagoe et Iulia Orban et M. Vasile Galbeneanu (-- les requerants --), ont saisi la Cour le 8 decembre 2000 en vertu de lnarticle 34 de la Convention de sauvegarde des Droits de lnHomme et des Libertes fondamentales (-- la Convention --).

2. Le gouvernement roumain (-- le Gouvernement --) a ete represente par M. B. Aurescu, agent du Gouvernement, puis par Mme R. Rizoiu, qui lna remplace dans ses fonctions.

3. Le 24 octobre 2003, la Cour (deuxieme section) a decide de communiquer la requete au Gouvernement. Se prevalant des dispositions de lnarticle 29 - 3, elle a decide que seraient examines en meme temps la recevabilite et le bien-fonde de lnaffaire.

4. Le 1er novembre 2004, la Cour a modifie la composition de ses sections (article 25 - 1 du reglement). La presente requete a ete attribuee a la troisieme section ainsi remaniee (article 52 - 1).

5. Le 10 decembre 2004, la Cour a estime qunil nny avait pas lieu de donner suite a la demande du Gouvernement de traiter separement la recevabilite et le fond de lnaffaire.


EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE LnESPECE

6. Les requerants, freres et soeurs, sont nes respectivement en 1940, 1942, 1947, 1933, 1938 et 1936 et resident respectivement a Pitesti (les deux premiers), a Voinesti, Campulung Muscel, Movileni et Calimanesti.

7. Par un jugement definitif du 28 juin 1995, le tribunal departemental dnOlt fit droit a lnaction formee par les requerants a lnencontre de la commission departementale dnOlt pour lnapplication de la loi no 18/1991 (-- la commission departementale -- et -- la loi no 18 --) et ordonna la reconstitution de leur droit de propriete sur un terrain de 33,5 hectares herite de leur pere, se trouvant a lninterieur du perimetre du village de Movileni.

8. En raison de la non-execution dudit jugement, les requerants assignerent la commission locale de Movileni pour lnapplication de la loi no 18 (-- la commission --) devant le tribunal departemental dnOlt afin de la voir condamner a les mettre en possession du terrain comme prevu par cette loi.

Par un jugement du 8 janvier 1996, le tribunal fit droit a leur action et, se fondant sur le jugement du 28 juin 1995, ordonna a la commission de mettre les requerants en possession de leur terrain. Il rejeta la demande de dedommagement des requerants, au motif qunelle aurait du etre formee devant les juridictions de contentieux administratif en vertu de la loi no 29/1990.

Ce jugement fut confirme par un arret definitif de la cour dnappel de Craiova, le 21 aout 1996.

9. Les requerants introduisirent ensuite une action en dommages-interets contre la commission, afin dnobtenir la reparation du prejudice cause par lnimpossibilite de cultiver leur terrain en 1996-1997.

10. Par un jugement du 10 novembre 1997, devenu definitif le 5 mars 1998, le tribunal departemental dnOlt fit droit a lnaction des requerants et condamna la commission a leur payer 97 762 535 lei roumains (ROL) a titre de dommages-interets ainsi que 150 000 ROL a titre de frais de justice.

11. Les requerants demanderent a lnhuissier de justice de les assister pour lnexecution forcee des decisions judiciaires rendues en leur faveur. Lnhuissier rejeta leurs demandes, et leur conseilla de former une nouvelle action a lnencontre des personnes responsables de la non-execution.

12. A la suite des lettres envoyees par les requerants a diverses autorites, le Mediateur (Avocatul poporului) les informa, le 8 novembre 2000, que la commission avait motive son refus de snexecuter par le fait que le terrain attribue par les juridictions aux requerants ne correspondait pas aux mentions du livre foncier et que, de toute façon, elle ne detenait plus de terrains disponibles dans le perimetre du village afin dnexecuter les decisions en cause.

13. Par une decision du 26 mai 2003, la commission departementale ordonna la reconstitution du droit de propriete des requerants, afin de faire executer lnarret du 28 juin 1995.

Cependant, par une lettre du 10 septembre 2003, la commission locale informa les requerants qunelle ne pouvait executer la decision de la commission departementale, ni lnarret du 28 juin 1995 car elle ne detenait plus de terrain disponible a lninterieur du perimetre du village.

14. Il ressort des informations fournies par les parties que les decisions rendues par les juridictions demeurent encore inexecutees.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

15. La reglementation interne pertinente, a savoir des extraits des codes civil et de procedure civile et de la loi no 188/2000 sur les huissiers de justice, figure dans la decision Roman et Hogea c. Roumanie (no 62959/00, 31 aout 2004).

Les extraits pertinents des lois nos 18/1991 sur le fond foncier et 169/1997 modifiant la loi ns 18/1991 sont mentionnes dans lnaffaire Sabin Popescu c. Roumanie (ns 48102/99, -- 42-46, 2 mars 2004).


EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE LnARTICLE 6 - 1 DE LA CONVENTION

16. Les requerants alleguent que lninexecution par lnadministration des decisions judiciaires definitives rendues en leur faveur a enfreint leur droit dnacces a un tribunal, prevu par lnarticle 6 - 1 de la Convention, qui est ainsi libelle :

-- Toute personne a droit a ce que sa cause soit entendue (...) par un tribunal (...), qui decidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractere civil (...) --

A. Sur la recevabilite

17. La Cour rappelle dnemblee que la violation alleguee du droit dnacces a un tribunal consiste en une situation continue qui ne prend fin quna la date a laquelle la decision judiciaire definitive est executee. Par consequent, le delai de six mois prevu a lnarticle 35 - 1 de la Convention ne commence a courir quna partir du moment ou cette situation continue prend fin (Sabin Popescu, precite, - 50). Dans la mesure ou les decisions definitives nnont toujours pas ete executees, il ne se pose pas en lnespece de probleme quant au respect du delai de six mois.

18. La Cour constate en outre que le grief nnest pas manifestement mal fonde au sens de lnarticle 35 - 3 de la Convention. Elle releve par ailleurs qunil ne se heurte a aucun autre motif dnirrecevabilite. Il convient donc de le declarer recevable.

B. Sur le fond

19. Le Gouvernement affirme que lnexecution en nature des decisions judiciaires ordonnant la mise en possession des requerants se heurte a une impossibilite objective, eu egard au fait qunil nny a plus de terrains disponibles sur le territoire du village de Movileni, qui pourraient etre octroyes aux requerants.

Le Gouvernement considere que les circonstances de lnespece ne sont pas comparables a la situation dans lnaffaire Jasiuniene c. Lituanie, (no 41510/98, 6 mars 2003) dans laquelle la Cour a conclu a la violation de lnarticle 6 de la Convention en raison de la non-execution dnune decision judiciaire ordonnant aux autorites soit dnoctroyer a la requerante un terrain, soit de lui allouer une somme a titre de reparation. Il rappelle que les decisions non executees dans la presente affaire nnont pas prevu de solutions alternatives a la mise en possession, notamment le paiement dnune reparation, et fait valoir qunune telle alternative nnetait meme pas prevue par la loi roumaine a la date des faits de lnaffaire.

20. Snagissant dnune obligation necessitant lnintervention personnelle du debiteur, les requerants auraient du demander aux tribunaux de condamner la commission au paiement dnastreintes ou dnune amende civile, afin de la forcer a executer lnarret, ou, en cas dnimpossibilite dnexecution, de la condamner au paiement de dommages-interets.

21. En tout etat de cause, pour le Gouvernement, lnarticle 6 - 1 nnentraine pas dnobligation pour les Etats dnexecuter tout jugement de caractere civil, quel qunil soit et quelles que soient les circonstances. Le Gouvernement cite, en ce sens, lnopinion dissidente de Mme Thomassen dans lnaffaire Ruianu c. Roumanie (no 34647/97, 17 juin 2003).

22. Enfin, snagissant du jugement du 10 novembre 1997, le Gouvernement estime que les requerants auraient du demander le paiement des dommages-interets par le biais de lnhuissier de justice.

23. Les requerants contestent les arguments du Gouvernement.

24. La Cour rappelle que lnexecution dnun jugement ou dnun arret, de quelque juridiction que ce soit, doit etre consideree comme faisant partie integrante du -- proces -- au sens de lnarticle 6 de la Convention. Le droit a un tribunal serait illusoire si lnordre juridique interne dnun Etat contractant permettait qunune decision judiciaire definitive et obligatoire reste inoperante au detriment dnune partie (Immobiliare Saffi c. Italie [GC], no 22774/93, - 63, CEDH 1999-V).

25. Dans la presente affaire, les requerants ont obtenu des decisions judiciaires definitives prescrivant des actions specifiques aux autorites. Il nnest pas conteste que ces decisions nnont ete ni executees, ni annulees ou modifiees a la suite de lnexercice dnune voie de recours prevue par la loi interne. De plus, les motifs que lnadministration aurait pu invoquer afin de justifier une impossibilite objective dnexecution nnont jamais ete portes a la connaissance des requerants par le biais dnune decision administrative formelle (Sabin Popescu, precite, - 72).

La lettre envoyee le 8 novembre 2000 par le Mediateur ne pouvait remplacer lnabsence dnune telle decision administrative, puisqunil ne snagissait meme pas dnun acte administratif emanant de lnautorite en cause, soit de la commission.

La lettre envoyee le 10 septembre 2003 par la commission ne satisfaisait pas non plus aux exigences decrites ci-dessus. Ainsi, elle contrevenait a la decision de la commission departementale du 26 mai 2003 qui avait confirme encore une fois lnarret du 28 juin 1995. Or, cette lettre ne pouvait remplacer une decision administrative formelle. En outre, la commission locale nnavait pas le pouvoir confere par une loi dnannuler ou de modifier, par ce biais, les droits conferes aux requerants.

26. La Cour admet, avec le Gouvernement, que le droit dnacces a un tribunal ne peut obliger un Etat a faire executer chaque jugement de caractere civil quel qunil soit et quelles que soient les circonstances (Sanglier c. France, no 50342/99, - 39, 27 mai 2003). Cependant, elle note que lnautorite en cause fait partie de lnadministration, qui constitue un element de lnEtat de droit, son interet snidentifiant avec celui dnune bonne administration de la justice. Or, si lnadministration refuse ou omet de snexecuter, ou encore tarde a le faire, les garanties de lnarticle 6 dont a beneficie le justiciable pendant la phase judiciaire de la procedure perdent toute raison dnetre (Hornsby c. Grece, arret du 19 mars 1997, Recueil des arrets et decisions 1997-II, pp. 510-511, - 41).

27. De plus, il nnest pas opportun de demander a un individu, qui a obtenu une creance contre lnEtat a lnissue dnune procedure judiciaire, de devoir par la suite engager une procedure dnexecution forcee afin dnobtenir satisfaction (Metaxas c. Grece, no 8415/02, - 19, 27 mai 2004).

En tout etat de cause la Cour a deja affirme que les voies de recours suggerees par le Gouvernement, soit la demande dnastreintes, dnamende penale ou de dommages-interets, sont des moyens indirects de faire executer la decision definitive, et ne sont donc pas de nature a remedier directement a la violation alleguee (Roman et Hogea, precite). Les requerants ne pouvaient donc etre tenus de les employer afin de voir executer les decisions judiciaires rendues en lnespece.

Par consequent, aucune demarche quant a lnexecution forcee des decisions definitives ordonnant la mise en possession nnetait requise de la part des requerants.

Pour les memes raisons, la Cour ne partage pas non plus la position du Gouvernement selon laquelle les requerants auraient du demander lnexecution forcee des decisions judiciaires par le biais de lnhuissier de justice en ce qui concerne le paiement des dommages-interets alloues le 10 novembre 1997.

28. A la lumiere de ce qui precede, la Cour rejette egalement lnargument du Gouvernement quant a la difference entre la presente affaire et lnaffaire Jasiuniene precitee. Elle rappelle que, dans les deux affaires, lnobligation dnexecuter incombait a lnadministration, et que les decisions non-executees restaient toujours valables et nnavaient pas ete ulterieurement modifiees ni annulees par les autorites competentes (Jasiuniene, precite, -- 28 et 30, et paragraphes 24 et 26 ci-dessus).

29. Ces elements suffisent a la Cour pour conclure que, dans la presente affaire, en refusant dnexecuter les decisions judiciaires definitives ordonnant la mise en possession des requerants et le paiement a leur profit de dommages-interets, les autorites nationales les ont prive dnun acces effectif a un tribunal.

30. Par consequent, il y a eu violation de lnarticle 6 - 1.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE LnARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1

31. Les requerants denoncent une atteinte a leur droit de propriete en raison de lninexecution des decisions definitive rendues en leur faveur par les juridictions internes. Ils invoquent lnarticle 1 du Protocole no 1 qui est ainsi libelle :

-- Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut etre prive de sa propriete que pour cause dnutilite publique et dans les conditions prevues par la loi et les principes generaux du droit international.

Les dispositions precedentes ne portent pas atteinte au droit que possedent les Etats de mettre en vigueur les lois qunils jugent necessaires pour reglementer lnusage des biens conformement a lninteret general ou pour assurer le paiement des impots ou dnautres contributions ou des amendes. --

A. Sur la recevabilite

32. La Cour releve que ce grief est lie au grief formule sous lnangle de lnarticle 6 - 1 de la Convention et doit donc egalement etre declare recevable.

B. Sur le fond

33. Le Gouvernement fait valoir que lesdites decisions judiciaires nnont fait naitre dans le patrimoine des requerants ni droit de propriete ni creance constituee. Dans le meilleur des cas, elles sont de nature a creer au profit des requerants une -- esperance -- de voir reconstituer leur droit de propriete sur le terrain. Il cite les arrets Brumarescu c. Roumanie ([GC], no 28342/95, - 70, CEDH 1999-VII) et Pressos Compania Naviera S.A. et autres c. Belgique (arret du 20 novembre 1995, serie A no 332, pp. 20-21, - 29).

De lnavis du Gouvernement, lnarret du 28 juin 1995 ne confere pas aux requerants de droit de propriete. Il ne fait qunordonner a la commission de leur delivrer un titre de propriete afferent a un terrain de 33,5 hectares dont lnemplacement nnest pas fixe par le tribunal. Des lors, la creance des requerants a un caractere incertain.

Snagissant du jugement du 10 novembre 1997, le Gouvernement rappelle que les requerants auraient du recourir a son execution forcee par lnintermediaire de lnhuissier de justice.

34. En tout etat de cause, lnatteinte apportee a lnespoir des requerants de voir reconstituer leur droit de propriete, due a lnimpossibilite dnexecuter une decision definitive, est justifiee a la lumiere de la jurisprudence de la Cour concernant lnarticle 1 du Protocole no 1. Ainsi, lningerence est prevue par la loi no 18, qui satisfait aux exigences dnaccessibilite et de previsibilite requises par la Convention.

35. Par ailleurs, le Gouvernement fait valoir qunil nny avait plus de terrain disponible dans le perimetre du village de Movileni afin de mettre les requerants en possession. Dans de telles conditions, ces derniers devaient former une nouvelle action contre la commission locale du village voisin.

En outre, selon le Gouvernement, les requerants auraient rejete les propositions de la commission de leur verser une indemnite compensatoire.

Des lors, le Gouvernement considere que lningerence dans les droits des requerants etait proportionnee au regard de lninteret general (Sporrong et Lönnroth c. Suede, arret du 23 septembre 1982, serie A no 52, p. 26, - 69).

36. La Cour rappelle qunun requerant ne peut alleguer une violation de lnarticle 1 du Protocole no 1 que dans la mesure ou les decisions qunil incrimine se rapportent a ses -- biens -- au sens de cette disposition. La notion de -- biens -- peut recouvrir tant des -- biens actuels -- que des valeurs patrimoniales, y compris des creances, en vertu desquelles le requerant peut pretendre avoir au moins une -- esperance legitime -- dnobtenir la jouissance effective dnun droit de propriete (Kopecky c. Slovaquie [GC], no 44912/98, - 35, 28 septembre 2004). La Cour a deja affirme qunune creance peut etre consideree comme une -- valeur patrimoniale -- des lors qunelle a une base suffisante en droit interne, par exemple lorsqunelle est confirmee par une jurisprudence bien etablie des tribunaux (Kopecky, precite, - 48). En outre, la Cour a estime que pouvait egalement revetir une certaine pertinence a cet egard la question de savoir si, dans le contexte de la procedure incriminee, le requerant pouvait pretendre avoir une -- esperance legitime -- dnobtenir la jouissance effective de son bien (Kopecky, precite, - 42).

37. Or, dans la presente affaire, les tribunaux ont ordonne la reconstitution du droit de propriete des requerants sur un terrain de 33,5 hectares (arret du 28 juin 1995) et ont ensuite condamne la commission a mettre les requerants en possession dudit terrain, comme prevu par la loi no 18 (jugement du 8 janvier 1996). La legislation nationale prevoit la procedure par laquelle la commission met les interesses en possession des terrains respectifs et leur delivre les titres de propriete afferents. Il en resulte qunen lnespece les deux decisions judiciaires ont cree dans le chef des requerants lnesperance legitime de se voir effectivement mettre en possession de leur terrain et que leur -- creance -- est suffisamment etablie pour constituer une -- valeur patrimoniale -- qui entraine lnapplication des garanties de lnarticle 1 du Protocole no 1.

38. Des lors, les requerants ont -- un bien -- au sens de lnarticle 1 precite.

39. La Cour note qunil nnest pas conteste qunil y a eu en lnespece une ingerence dans le droit de propriete des requerants. Elle rappelle qunen refusant dnexecuter les decisions definitives, les autorites nationales ont prive les requerants de la jouissance de leur droit de propriete sur leur terrain sans leur fournir de justifications pour cette ingerence (Sabin Popescu, precite, - 81, et paragraphe 25 ci-dessus). Dans ces conditions, etant donne que les requerants nnont pas ete informes dnune maniere qui satisfaisait aux exigences de la Convention de cette impossibilite dnexecution, la Cour ne saurait admettre lnargument du Gouvernement selon lequel, apres avoir pris connaissance du fait que la commission de Movileni ne detenait plus de terrains disponibles, les requerants auraient du introduire une action contre la commission locale du village voisin.

40. La Cour constate enfin que le Gouvernement nna pas etaye ses allegations quant a une eventuelle proposition de reparation de la part de la commission qui aurait ete rejetee par les requerants.

41. Par consequent, le Gouvernement nna offert aucune justification valable pour lningerence causee par la non-execution des decisions judiciaires rendues en lnespece ; elle etait donc arbitraire et emportait violation du principe de legalite. Une telle conclusion dispense la Cour de rechercher si un juste equilibre a ete maintenu entre les exigences de lninteret general de la communaute et les imperatifs de la sauvegarde des droits individuels des requerants (Metaxas, precite, - 31).

42. Quant au paiement des dommages-interets fixes par le jugement du 10 novembre 1997, la Cour rappelle qunelle ne partage pas non plus lnargument du Gouvernement selon lequel les requerants auraient du demander lnexecution forcee par le biais de lnhuissier de justice (paragraphe 22 ci-dessus).

Cette somme, bien que fixee de maniere definitive par les juridictions, nna toujours pas ete payee aux requerants.

43. Des lors, a la lumiere de ce qui precede, la Cour estime qunil y a eu en lnespece violation de lnarticle 1 du Protocole no 1.

III. SUR LnAPPLICATION DE LnARTICLE 41 DE LA CONVENTION

44. Aux termes de lnarticle 41 de la Convention,

-- Si la Cour declare qunil y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet dneffacer qunimparfaitement les consequences de cette violation, la Cour accorde a la partie lesee, snil y a lieu, une satisfaction equitable. --

A. Dommage

45. Les requerants reclament premierement lnattribution en possession du terrain de 33,5 hectares comme ordonne par les decisions definitives rendues en lnespece.

Ils demandent aussi le paiement des dommages-interets reactualises, attribues par le jugement du 10 novembre 1997, dnun montant qunils estiment de 4 756 098 400 ROL pour le prejudice materiel et moral qunils ont subi.

46. Snappuyant sur les conclusions dnune expertise effectuee en lnespece, le Gouvernement considere que la valeur reelle des dommages-interets reactualises compte tenu de lninflation est de 481 871 535 ROL. Se fondant sur la meme expertise, il estime la valeur marchande du terrain a 234 500 000 ROL. Finalement, il souligne que les autorites continuent leurs demarches en vue de trouver une solution afin de mettre les requerants en possession du terrain.

47. La Cour estime que la question de lnapplication de lnarticle 41 sur ce point ne se trouve pas en etat, de sorte qunil convient de la reserver en tenant egalement compte de lneventualite dnun accord entre lnEtat defendeur et les interesses (article 75 -- 1 et 4 du reglement de la Cour).

B. Frais et depens

48. Les requerants demandent egalement 810 825 ROL pour les frais et depens encourus devant les juridictions internes, representant la reactualisation, compte tenu de lninflation, de la somme de 150 000 ROL octroyee a ce titre par le jugement du 10 novembre 1997. Ils ne demandent pas de remboursement des frais et depens encourus devant la Cour.

49. Le Gouvernement ne snoppose pas a ce que la somme de 150 000 ROL reactualisee soit payee aux requerants a ce titre.

50. Compte tenu des elements en sa possession et des criteres susmentionnes, la Cour estime raisonnable la somme de 20 EUR au titre des frais et depens deja encourus dans la procedure nationale et lnaccorde aux requerants.

C. Interets moratoires

51. La Cour juge approprie de baser le taux des interets moratoires sur le taux dninteret de la facilite de pret marginal de la Banque centrale europeenne majore de trois points de pourcentage.


PAR CES MOTIFS, LA COUR

1. Declare, a lnunanimite, la requete recevable ;


2. Dit, par six voix contre une, qunil y a eu violation de lnarticle 6 - 1 de la Convention ;


3. Dit, par six voix contre une, qunil y a eu violation de lnarticle 1 du Protocole no 1 ;


4. Dit, a lnunanimite, que la question de lnapplication de lnarticle 41 de la Convention ne se trouve pas en etat en ce qui concerne la fixation de la reparation pour les violations constatees en lnespece ;

en consequence,

a) la reserve en entier ;

b) invite le Gouvernement et les requerants a lui adresser par ecrit, dans le delai de trois mois a compter du jour ou lnarret sera devenu definitif conformement a lnarticle 44 - 2 de la Convention, leurs observations sur cette question et notamment a lui donner connaissance de tout accord auquel ils pourraient aboutir ;

c) reserve la procedure ulterieure et delegue au president de la chambre le soin de la fixer au besoin.


5. Dit, a lnunanimite,

a) que lnEtat defendeur doit verser aux requerants, dans les trois mois a compter du jour ou lnarret sera devenu definitif conformement a lnarticle 44 - 2 de la Convention, 20 EUR (vingt euros) pour frais et depens encourus devant les juridictions internes, plus tout montant pouvant etre du a titre dnimpot ;

b) quna compter de lnexpiration dudit delai et jusqunau versement, ce montant sera a majorer dnun interet simple a un taux egal a celui de la facilite de pret marginal de la Banque centrale europeenne applicable pendant cette periode, augmente de trois points de pourcentage.

Fait en français, puis communique par ecrit le 7 avril 2005 en application de lnarticle 77 -- 2 et 3 du reglement.



Vincent Berger Bo¹tjan M. Zupanèiè
Greffier President

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